Oui et à plusieurs niveaux ! D’abord, ce sont des relations non-choisies : les frères et sœurs vivent dans la même maison, sont contraints de rester ensemble et cette relation s’étale dans le temps. Ensuite, de nombreuses émotions contradictoires entrent en jeu dans ces relations : intérêt et désintérêt, amour et détestation, jalousie et indifférence, etc. Enfin, les frères et sœurs sont des modèles identitaires : on peut se construire pour chercher à être différent de son frère ou sa sœur, ou au contraire pour être comme lui. Mais les frères et sœurs sont toujours un modèle dans la construction de l’enfant. C’est ce qui rend les relations aussi complexes.
La place dans la fratrie joue-t-elle ?
La place dans la fratrie a effectivement une incidence sur la formation des caractères. Pourquoi ? Les parents ne sont pas dans le même état émotionnel quand ils accueillent le deuxième enfant car ils en ont déjà fait l’expérience une fois. Ensuite, il existe déjà un modèle dans la famille avec l’aîné. Une relation est déjà construite entre le premier enfant et les parents, ce qui va également avoir une incidence pour le second enfant.
Comment garantir une place pour chaque enfant ?
Quand un nouvel enfant arrive, il est important de parler de sa venue, de rassurer votre enfant sur le fait que certaines choses vont changer mais d’autres, comme l’amour, la disponibilité, la relation avec vous, ne vont pas changer.C’est un travail de prévention car il faut savoir que le premier enfant va de toute façon exprimer un sentiment de jalousie : quand les parents s’occupent du plus petit, l’aîné va croire qu’ils se désintéressent de lui. Les parents n’ont pas à culpabiliser si l’enfant ne veut pas de frère ou sœur : c’est une réaction normale !
Et quand ils grandissent ?
Certains frères et sœurs vont s’aimer toute leur vie et d’autres se détester, il n’y a pas vraiment de recettes ! Les parents ne doivent pas de sentir responsables si leurs enfants ne s’entendent pas bien. Mais on peut quand même donner quelques conseils qui peuvent favoriser le bien-être des enfants.La première chose à faire, c’est de ne jamais comparer les enfants entre eux. Chaque enfant est différent, et chacun a ses qualités !Ensuite, veiller à personnaliser la relation : cela veut dire passer du temps avec les uns et les autres, chacun leur tour. Vous pouvez dire à votre enfant qu’un mercredi sur deux, de telle heure à telle heure, vous êtes uniquement avec lui et lui laisser choisir une activité qui lui plaît. Il sera ainsi en attente de ces moments.Parfois, notamment lors de l’entrée au collège d’un des enfants, les intérêts du plus grand et du plus petit divergent et la relation va changer. Le plus jeune se sent souvent abandonné. Il va alors avoir davantage besoin de la disponibilité des parents.Le parent peut dans ce cas servir de médiateur : raconter « ton petit frère a fait si ou ça ». Même si le jeune adolescent dit qu’il s’en fiche, il est important de continuer pour maintenir le lien entre eux. Cette distance est sans doute temporaire : ils se retrouveront après car ils ont cet ancrage dans la même tribu !
Si les comportements entre frères et sœurs sont agressifs ou violents, comment réagir ?
Face à la violence, il faut vraiment appliquer la tolérance zéro. S’ils se chamaillent, on peut les laisser se débrouiller pour les inciter à trouver eux-mêmes une solution. Ils ne doivent pas toujours attendre qu’un tiers résolve le conflit.Mais s’ils en viennent aux mains, ou à des insultes qui dépassent les limites, vous devez absolument intervenir pour poser le cadre : créer une discussion à trois où chacun peut s’exprimer à tour de rôle puis entamer une négociation en leur demandant « qu’est-ce qu’on peut faire ? ». Ce dialogue doit permettre de mettre en place, avec eux, un protocole pour éviter la violence.Mais cela nécessite des parents calmes ! Si la tension est grande, mieux vaut séparer tout le monde et revenir à la discussion plus tard. On peut aussi parler avec chacun des frères et sœurs dans un second temps, car certaines choses ne peuvent s’exprimer devant l’autre.
Que faire si l’un des frères ou sœur domine l’autre ?
Parfois, l’un est extraverti et se donne en spectacle, l’autre reste bon public pour le regarder ! Les enfants vont alors être très différents mais complémentaires. Autre cas de figure, lorsque l’un des enfants a des besoins spécifiques, s’il est en situation de handicap par exemple, la relation sera forcément déséquilibrée car un enfant a plus de besoins que les autres. Il faut alors bien expliquer la situation aux enfants et raconter comment la famille va y faire face.Cela devient problématique si la relation entre frères et sœurs est déséquilibrée au point que l’un domine l’autre. Une relation de domination peut être basée sur la peur, l’admiration sans borne ou peut être inconsciemment induite par les parents lorsqu’ils comparent les enfants.Il faut aider le dominé à s’affirmer davantage, en en parlant et en se basant sur des exemples concrets. Lui dire uniquement « T’inquiète pas, ça va aller » ou « ça va passer » ne va pas suffire ! Vous pouvez par exemple énumérer régulièrement les choses pour lesquelles il est doué, lui rappeler qu’aucune comparaison n’est intéressante, que chacun est différent et bon dans différents domaines.Les enfants sont également très intéressés pour savoir comment leurs parents ont réagi dans des situations similaires à celles qu’ils sont en train de vivre : vous pouvez par exemple raconter qu’à leur âge, face à telle situation où votre frère vous a mal parlé, vous avez ressenti telle ou telle émotion. Si vos souvenirs d’enfance sont flous, vous pouvez vous autoriser à inventer une histoire !
Tout est donc question de communication ?
La parole est très importante et les parents doivent se faire confiance. Vous pouvez faire feu de tout bois ! Quand vous regardez un dessin animé ou lisez un livre, vous pouvez le commenter ensemble. Ce sont des moments pour rappeler : « dans notre famille, on ne tape pas son frère », « on ne dit pas ça à sa sœur », etc.Chacun son style : on peut parler des relations entre frères et sœurs via des histoires qu’on raconte, des saynètes, mais aussi en faisant des jeux, du sport, des activités créatives. On peut par exemple mobiliser les contes, comme Cendrillon ou les contes d’Andersen, etc. On peut inventer des histoires avec les Playmobil ou les poupées des enfants.Vous pouvez aussi essayer de vous rappeler vos propres relations fraternelles quand vous étiez enfants, pour mieux les comprendre. Et, bien sûr, échanger avec d’autres parents parce que les relations entre frères et sœurs sont forcément complexes !